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13/05/2009

LE JUGE BURGAUD, BOUC EMISSAIRE

Publié sur Le Post le 26/04/2009

 Une erreur judiciaire est forcément toujours scandaleuse.

Quand on en est victime, on s'escrime à faire réformer la décision contestée par toutes les voies possibles, on essaye de valoriser son préjudice.  Certains, moins combatifs, plus fatalistes, préfèrent laisser tomber, oublier. .

Outreau les accusés ont eu deux immenses avantages au regard de l'erreur judiciaire ordinaire.  Premièrement, ils étaient nombreux, bien plus nombreux que dans un procès ordinaire.  Et on a toujours tendance à écouter la majorité...  Il est très difficile de se faire entendre quand on se trouve face à une masse unie et organisée, et c'est également vrai pour le procureur.  Deuxièmement, certains d'entre eux (Roselyne Godard, la "boulangère") étaient défendus par le célèbre Me Dupond-Moretti, le détenteur du record d'acquittements en France.  Tout avocat se demande quel est son secret.  Se situe-t-il en amont, dans un choix judicieux des dossiers qu'il défend ?  Ou a-t-il un réel talent pour tirer n'importe qui des griffes de la justice ?  Ce talent m'inquièterait plus, car alors un tel succès serait peut-être synonyme d'erreur judiciaire pour les victimes présumées des personnes qu'il défend ... Mais passons...

Lorsque le scandale d'Outreau a éclaté, la figure du juge Burgaud est apparue comme celle d'un ... coupable idéal.  D'aspect juvénile (en réalité, pas si jeune, il avait déjà près de trente ans au moment des faits et il a actuellement trente-sept ans), taiseux, un peu frèle, il n'allait pas opposer une défense très dure, dont acte. .

La chose qui m'inquiète le plus dans cette affaire, c'est que si c'est bien le juge d'instruction qui instruit le dossier, à charge et à décharge, ce n'est pas lui qui ordonnera une incarcération.

Sans la signature du juge des libertés et de la détention (le JLD), qui a pour mission d'étudier le dossier que lui remet le juge d'instruction, pas d'incarcération en cours d'instruction. Dix-huit personnes seront incarcérées en cours d'instruction sur ordre du JLD (et non par la seule volonté de Burgaud) et dix-sept seront renvoyées vers le tribunal de Saint Omer (une personne est morte durant son incarcération). Au procès de Saint Omer, pas moins de six personnes furent condamnées.  Et pas par le juge d'instruction évidemment, par les magistrats du siège.  Lorsque la Cour d'Appel de Paris a ensuite été saisie de cette affaire, un juge qui y siégeait (et pas le juge d'instruction Burgaud) a rejeté les demandes de mise en liberté d'un des (à l'époque) futurs acquittés (ce même juge a ensuite fait partie du CSM qui a réprimandé le juge Burgaud).  Aucune des incarcérations n'est du seul fait du juge Burgaud !!!

Pire, ce n'est pas lui qui a instruit l'affaire de bout en bout !  Le juge Burgaud a été saisi du dossier de février 2001 à août 2002 (donc environ 18 mois).  L'instruction s'est close en mai 2003, donc près d'un an après.  L'ordonnance de mise en accusation qui a renvoyé les accusés vers le tribunal de Saint Omer ne sera même pas signée par Burgaud mais par son successeur qui planchait depuis près d'un an sur le dossier ! Et tout en gardant à l'esprit que la personne qui décide en définitive de l'emprisonnement n'est même pas le juge d'instruction !

Cette affaire a duré cinq ans (de février 2001 à décembre 2005) et n'est passée que 18 mois entre les mains du juge Burgaud, lequel n'a même pas bouclé lui-même l'instruction. 

Dans ces conditions, il me semble que le juge Burgaud fait bien figure de bouc émissaire, n'étant qu'un maillon intermédiaire et temporaire dans une mécanique qui a grippé.

Mais je vois des personnes qui réclament la tête du juge Burgaud.  Si sa tête tombait, elle ne pourrait tomber seule ...  Et pour cette raison, sanctionner le seul juge Burgaud me paraît injuste.  Soit on ne sanctionne personne, soit on sanctionne tous les verrous de sécurité qui ont sauté et plus précisément le JLD et les magistrats du siège.

 (Sources : Wikipedia, Reuters, Légifrance).

 Par Doris Glénisson, DESS de Droit, MBA

AVERTISSEMENT : Veuillez, par courtoisie ne pas citer mon nom de famille dans  vos critiques.

 

21/03/2009

MIEUX VAUT ETRE L'AVOCAT DE LA DELINQUANCE EN COL BLANC QUE CELUI DU MILIEU

Publié sur LePost le 27/12/2008

L'avocat Karim Achoui est bien connu des médias pour ses livres et la tentative d'assassinat dont il a fait l'objet.  Rappelons qu'il avait imputé cette tentative à la police. 

On l'appelait "l'avocat du milieu".  C'est d'ailleurs le titre qu'il a choisi pour un de ses livres.  Avocat brillant, on pourrait même dire "clinquant", il avait aussi racheté il y a quelques mois, une ancienne robe d'avocat de François Mitterrand.

Le 15 décembre 2008, la Cour d'Assises de Paris l'a condamné à sept ans de prison fermeLa peine semble extrêmement lourde.  C'est la même peine que celle prononcée récemment à l'encontre de trafiquants d'héroïne, de terroristes qui recrutaient pour former de futurs djihadistes ou d'un receleur de montres de luxe.

Dans l'affaire Dutroux en Belgique, Michel Nihoul qui avait été reconnu coupable d’être le chef d'une association de malfaiteurs impliquée dans un trafic de drogue, de voitures, de documents d'identité ou dans la traite des êtres humains, n'avait écopé que de cinq ans de prison.

L'avocat du milieu, l'avocat de la pègre a donc été jugé comme un des leurs.  Et c'est comme un dangereux malfrat qu'il a été conduit menotté et les yeux bandés en prison.

L'absence de preuve tangible ne semble pas avoir joué en sa faveur. 

Me Karim Achoui a été mis en cause sur le fondement d'un faisceau d'indices, notamment des transcriptions de conversations entre truands mentionnant le recours au "baveux" - un avocat dans leur jargon - et l'enregistrement fortuit d'une conversation entre les assaillants de Fresnes, juste après l'assaut, où il semble être mentionné.

L'accusation considère aussi qu'en envoyant un de ses collaborateurs à la prison la veille des faits, Me Karim Achoui aurait donné le signal de l'opération à Ferrara. Ce dernier a refusé la fouille pour être placé dans une cellule disciplinaire proche du mur d'enceinte ensuite pris d'assaut.

Me Francis Szpiner, à la suite du verdict, a déclaré aux journalistes : "En France, il ne faut être ni avocat, ni Arabe, on s'en sort mieux".

Je dirais pour ma part qu'il vaut mieux être l'avocat de la délinquance en col blanc que celui de la pègre.  Pour exemple, les gens du milieu se trouvent généralement condamnés à des peines bien plus lourdes que des délinquants en col blanc, en dépit du fait que les sommes détournées par ceux-ci sont souvent nettement supérieures. 

Me Patrick Maisonneuve, autre avocat de Karim Achoui, a également estimé qu'il fallait reprendre complètement le dossier et confirmé que son client demanderait sa remise en liberté, stigmatisant un "catalogue d'anomalies".

Il faut aussi garder à l'esprit que Me Karim Achoui  impute à la police l'attentat commis à son encontre, ce qui lui a valu des poursuites en diffamation de la part du ministère de l'Intérieur. Au procès, il a aussi soutenu la thèse d'un complot. 

Il me semble évident que ces conditions, surajoutées à sa proximité d'un milieu pour lequel la justice a peu d'égards, ont fait de l'auxiliaire de la justice un paria à abattre.

Ironie du sort, Me Karim Achoui, qui avait affirmé avoir fait de bons gueuletons avec les gendarmes et les autres accusés durant les trois jours de délibéré, s'est mis en grève de la faim et de la soif à l'annonce du verdict afin d'obtenir sa libération en attendant son procès en appel.

Un chef d'entreprise, Rachid Nekkaz, s'est également mis en grève de la faim avec la même revendication.

Un comité de soutien s'est constitué pour l'avocat, et a organisé des manifestations.  Les prochaines manifestations pour Karim Achoui sont indiquées sur son blog.

Par Doris Glénisson, DESS de Droit, MBA (major de la promo), Lic Sc Eco, Cand Ing civil

(Sources : Reuters, AFP, Blog de Karim Achoui, Wikipedia)

AVERTISSEMENT : Veuillez ne pas citer mon nom de famille dans vos critiques

ESCROQUERIE FINANCIERE : LE BON PROFIL ET LA BONNE METHODE

Publié et répéré sur LePost, le 20/12/2008

On avait connu le trader Nick Leeson.

En février 1995, à 28 ans, il avait engagé près de 27 milliards de dollars sur des produits dérivés asiatiques, à l'origine de 1,4 milliards de dollars de pertes pour la Barings (950 millions d'euros actuels).

Le profil de Nick Leeson : un jeune autodidacte que l'on avait laissé sans contrôle.

La méthode utilisée : des faux en écriture pour dissimuler les pertes

Sa condamation : 6 ans et demi de prison et 70.000 livres sterling d'amende

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Ensuite, il y eut le trader Jérôme Kerviel.

Il est accusé d'être le responsable de 4,82 milliards € de pertes résultant de prises de positions dissimulées et contraires aux règlements de la Société générale entre 2007 et 2008.

Le profil de Jérôme Kerviel : DEUG en sciences économiques, licence en IUP, DESS  « back et middle office ».  Il avait travaillé au système de contrôle avant de devenir Trader (le loup dans la bergerie en quelque sorte).

La méthode utilisée : des faux en écriture pour masquer l'importance et le risque des positions qu'il avait prises

Sa condamnation : à venir

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Maintenant, il y a Bernard Madoff.

Il est arrêté pour avoir réalisé un montage financier qui pourrait avoir entraîné la perte de 50 milliards USD.

Le profil de Bernard Madoff : autodidacte, ancien président du Conseil des directeurs du Nasdaq (à nouveau le loup dans la bergerie)

La méthode utilisée : une chaîne de Ponzi, c'est-à-dire qu'il utilisait les fonds de ses nouveaux clients pour rémunérer les anciens.

Sa condamnation : à venir

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Le profil classique du trader : Selon Fimarkets.com, la norme en France, est un diplôme de grande école d'ingénieur (X, Centrale, Mines-Ponts, Télécom, Sup'Aéro, ENSAE etc.) doublé d'un troisième cycle financier ou stochastique.

En conclusion, on peut constater que ces escrocs sont systématiquement des autodidactes (Leeson et Madoff) ou en tout cas n'avait pas le diplôme généralement exigé (Kerviel).  Il s'agit donc de personnes très ambitieuses, qui sans avoir fait les études nécessaires voulaient accéder à des postes de financiers et encaisser de très gros revenus. Il s'agit aussi parfois de personnes qui ont été intégrées au contrôle et qui ont mis à profit leurs connaissances des contrôles pour optimiser leurs dissimulations (le policier devenu voyou), ce fut le cas de Madoff et Kerviel.  Et quand ils n'étaient pas des personnes qui connaissaient les rouages du contrôle, voire y présidaient, il s'agissait d'une personne non-contrôlée (Leeson).

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Les solutions :

Elles se situent au niveau du contrôle et du recrutement.

1 - une parfaite étanchéité entre les contrôles et les financiers et des contrôles plus stricts

2 - une plus grande rigueur dans le contrôle de la moralité, des connaissances et des diplômes des financiers (bref préférer le séminariste boutonneux au beau gosse lèche-cul).

Une question demeure : est-ce que les titulaires de hauts diplômes sont plus honnêtes, ou seulement plus compétents pour dissimuler leurs fraudes? Car en l'occurrence, les fraudes de ces trois escrocs étaient simples, et même simplissimes: une pyramide et des faux en écriture. Peut-on imaginer des fraudes extrêmement complexes qui n'ont pu être percées à jour?  Par ailleurs, il arrive un seuil où les pertes ne sont plus dissimulables.

Par Doris Glénisson, DESS de Droit, MBA (major de la promo), Lic SC Eco, Cand Ing civil

(Sources: Wikipedia, Boursier, Fimarkets)

AVERTISSEMENT : Veuillez ne pas citer mon nom de famille dans vos critiques